«Les gens satisfaits ne sont jamais créatifs.»

«c’est constamment s’enfanter. Retrouver les paradis perdus que l’on soupçonnait au fond de son landau.»

«visuel est chose difficile, le verbal verse vite dans la complaisance.»

«comique a toujours raison puisqu’il fait rire.»

«comique, l’humour… est souvent la différence entre santé et folie, survie ou désastre ou même la mort. C’est la soupape de sureté des passions humaines. Sans l’humour, l’homme ne pourrait survivre au plan émotionnel.»

«Il n’y a rien dans la comédie qui ne soit dramatique. Diriger un film comique est en soi une situation très dramatique… La comédie est toujours cruelle car elle suppose que l’on rit de soi même. Chaplin aussi était très agressif. Or agressif ou non, un metteur en scène est aussi vulnérable  à la peur.»

«les politiciens nous procuraient une plus grosse dose d’éclats de rire, nous les écouterions davantage. La comédie est un biais parfait pour se faire entendre d’autrui.»

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«Je pense souvent à ce gosse maigre et solitaire qui voulait devenir un clown parce qu’il se sentait mal dans sa peau et qu’il voulait cacher son angoisse derrière un masque afin d’être autre chose qu’un visage triste parmi d’autres. Constamment, des gens viennent me voir et me disent : «humour m’a aidé à bien vieillir.» Ca me réchauffe le cœur. Ayant débuté ma carrière très jeune, j’ai eu la chance de pouvoir jouer pour quatre générations


Jerry Lewis : Dr Jerry et Mr Lewis

(Stock-cinéma ; 1982)

Propos du réalisateur

«Comment avez-vous mis au point les traits physiques et la coiffure  de Buddy Love ?

- J’ai simplement tâché d’imaginer à quoi ressemblerait un idiot insupportable. J’ai fait des recherches très efficaces, il me suffisait de sortir dans la rue, et je le retrouvais sur tous les coins de trottoir.

Vous aviez aussi quelques souvenirs précis ?

Je me souviens avoir eu affaire à toutes sortes de gens, et les avoir fondus en un seul personnage : le résultat fut Buddy Love. Je l’ai immédiatement détesté. Je n’arrivais pas à le jouer. Pour moi, c’était un pur poison, et s’il a une réelle existence, c’est parce que je l’ai profondément haï.  Le jouer était intenable pour moi. En fait, dans mon plan de travail, j’ai rejeté toutes ces scènes à la fin du tournage, lorsque je n’avais plus une seule scène à tourner avec le professeur.

La transformation du professeur  en Buddy Love est physiquement douloureuse, mais le retour à l’original est sans douleur, pourquoi ?

Parce que chaque fois que vous entrez dans une situation de plaisir, vous ne sentez rien d’autre. Il y a une excitation et une hâte d’arriver qui  couvre tout.  Mais si vous vous rapprochez de quelqu’un que vous ne voulez pas être, c’est très pénible. Votre remarque est curieuse, car au départ, je ne voulais que le professeur redevienne lui-même. Je ne voulais pas montrer la période de transition émotionnelle. Je n’ai jamais filmé le changement, sauf dans la dernière scène, où on le voit retrouver sa vieille personnalité. Et la seule douleur que j’ai montrée était sa douleur de faire de sales choses en tant qu’individu. Mais l’aspect schizophrénique de tout être humain est une chose pénible à considérer.  Nous ne voulons pas faire du mal à autrui, ou qu’autrui nous en fasse. Si vous analysez ce scénario, tout ce que j’ai essayé» de dire, c’était : restons nous-mêmes.

Le double  vous permet ainsi de vous haïr vous-même : vous n’avez plus à détester les autres. Je crois que c’est le sujet principal du film. Finalement c’est une lutte à mort entre vous et vous-même.

Je n’ai jamais voulu signifier autant de choses que vous m’ne faites dire ! Jusqu’à notre petite discussion, je n’avais jamais réalisé à quel point j’étais intelligent…

Jerry… ce n ‘est pas vous : c’est l’autre !

Ok ... Touché…»

Entretien avec Jerry Lewis par Robert Benayoun et André S. Labarthe (Cahiers du cinéma N° 197 : spécial Jerry Lewis : noêl 1967/ janvier1968