La_blessure

Né à Carrare en Toscane et habitant Rome depuis vingt ans,  Claudio Del Punta, dès ses premiers films s’est intéressé à des réalités lointaines filmant des protagonistes différents de son quotidien. Gioco di squadra (1996), un court métrage où une adolescente apprend qu'elle est séropositive, a notamment été présenté à la Mostra de Venise et a reçu plusieurs prix.

Depuis 2003, il a réalisé plusieurs documentaires sur les Caraïbes, principalement sur Cuba, Haïti et la République dominicaine.

Haiti Chérie est son premier film de fiction

La majorité des acteurs est non professionnelle et la plupart d'entre eux travaille et vit dans les plantations de canne à sucre en République Dominicaine.

« Haïti Chérie » est le titre d’une chanson de Toto Bissainthe, que beaucoup d’Haïtiens considèrent comme leur hymne national.

Synopsis


 

République Dominicaine. Jean-Baptiste et Magdaleine sont mariés. Ils vivent sur une plantation de canne à sucre. Magdaleine ne supporte plus la vie dans la Batey (nom créole pour les plantations) et veut retourner en Haïti. Même si Jean-Baptiste espère pour eux deux une vie meilleure en République Dominicaine, la mort de leur enfant de sous-alimentation confirme sa décision.

La tentative de viol de Magdaleine par l'un des gardes va précipiter leur départ. Avec l'aide d'Ernesto, médecin militant de la plantation, ils s'enfuient, emmenant avec eux Pierre, un jeune coupeur de canne de 14 ans complètement dévoué à Magdaleine.

Le groupe traverse la République Dominicaine, essayant d'oublier leur vie de misère et les injustices qu'ils ont subies jusque lors. Une situation d'autant plus choquante quand elle est mise en regard du tourisme florissant sur cette partie de l'île et qui n'a aucun contact avec leur réalité.

Le retour du couple en Haïti sera une rencontre tragique avec un monde dévasté par la pauvreté et la violence, où le fatalisme passif des habitants donne l'impression que le temps s'y est arrêté...

Claudio Del Punta

« Ce qui m'a toujours frappé dans l'horrible tragédie des haïtiens en République Dominicaine est que cette situation d'exploitation méthodique et consciente a été mise en œuvre par un Etat à la constitution reconnue et légitimée par les pays européens et le monde occidental. Un monde où l'on pense que les règles de cohabitation civile et de l'état de droit sont respectées. Et en fait il n'en est rien car ce traitement esclavagiste d'un peuple par un peuple voisin rappelle des situations qui devraient appartenir au passé, à la fin du 18ème siècle plus exactement. Mais le fait que cette situation perdure, inchangée, est encore pire puisqu'on la voit aujourd'hui avec les yeux de la conscience moderne. » Claudio Del Punta

« Haïti chérie montre ainsi intelligemment, ne serait-ce que par cette construction narrative, qu'il n'y a pour beaucoup de gens sur cette terre nul endroit où aller, nul espoir à entretenir, nulle aide à attendre. Si le cinéma pouvait changer cet état de fait, cela se saurait de longue date, du moins peut-il, à l'instar de ce film, en faire partager le sentiment. »  Jacques Mandelbaum Le Monde 27/05/2008

« Nous recevons le film comme un choc, mais il ne nous ôte pas la parole comme le Cauchemar de Darwin : il donne l’envie d’en savoir plus et coupe toute insouciance face aux forfaits vacances des paradis touristiques. Et s’impose ainsi comme un film salvateur. » Olivier Barlet Africultures

« Haïti chérie est une fiction qui semble se dérouler au coeur du réel, qui semble entrer dans le champ bien souvent, ou l’effleurer. À quelques exceptions près, les acteurs sont d’ailleurs non professionnels, et certains rejouent vraisemblablement des situations vécues. Cette démarche procure souvent l’impression d’un alliage entre un réalisme étrange et une poésie brutale, qui n’est pas sans faire songer à celle de Nicolas Klotz dans La Blessure (2005), autre histoire de vies de douleur d’exilés. » Arnaud Hée  Kriticat.com

« C’est un film qui écrit son histoire dans la marge du spectaculaire. Un film inactuel au sens où il s’intéresse à ce que généralement l’actualité délaisse...D’autre part, plus impalpables mais tout aussi chiens de garde, les démons de la compassion, kleenex aussi vite trempé de larmes que jeté à la poubelle, ou, pire encore, la misère comme esthétique. Le réalisateur, formé à l'école du documentaire, a esquivé tous ces dangers. Ce qui n’empêche pas son image d’être belle car on ne voit pas au nom de quelle étrange loi du pléonasme, les misérables sont forcément abonnés à l’image pauvre. » Gérard Leford Libération  28/05/2008