L'Opéra_synopsis
L'Opéra_Entretien avec le réalisateur

EXTRAITS CRITIQUES


 Après La Danse, le Ballet de l’Opéra de Paris, de Frederick Wiseman, voici un autre documentaire sur l’institution parisienne, qui évoque lui aussi les ballets, mais privilégie la production lyrique (Mozart, Berlioz…). Le film est assemblé, monté et orchestré comme un opéra. On suit les répétitions de Moïse et Aaron (Schoenberg). On assiste à des réunions de l’équipe de direction. L’exploration se fait des combles au sous-sol. Partout domine ce sentiment d’être dans une ruche, où les petites mains comme les chefs sont animés par le même élan, le même devoir d’exigence et d’excellence. Le cinéaste s’attarde sur certains protagonistes emblématiques. Comme Stéphane Lissner, le directeur consciencieux (le portrait est peut-être un peu trop flatteur, seul bémol). Ou bien Mikhaïl Timoshenko, jeune baryton-basse plein d’enthousiasme.

L’un des atouts majeurs du film est l’éloge du partage et de la démocratisation. L’Opéra, tel qu’il est montré, n’est pas réservé aux mélomanes. Il s’adresse à tous, jusque dans sa rigueur. Ainsi, ces séquences émouvantes sur les « petits violons », élèves d’une classe de CM2 en ZEP, dont on suit le travail en vue d’un concert. La marraine qui les encourage leur glisse que la musique est « une entrée dans un monde magique ». Le film dans son ensemble en offre l’illustration.

Jacques ­Morice, Télérama


Ici, pas de stars : tout le monde sur un pied d’égalité

D’autres figures, plus ou moins récurrentes, peuplent ce film. Comme la régisseuse de scène, celle qui, depuis sa cabine, donne les "tops", c’est-à-dire qu’elle indique aux services lumières, accessoires, machineries, etc., à quel moment intervenir dans le spectacle : elle donne lieu à quelques scènes parmi les plus poétiques du film qu’on vous laisse découvrir. D’autres figures encore sont de véritables stars, comme Benjamin Millepied (auquel a été consacré un autre beau documentaire, Relève, histoire d’une création), qui a été pendant un an et demi directeur de la Danse au sein de l’institution, ou encore Jonas Kaufmann, l’un des ténors les plus célèbres au monde, filmé pendant une répétition orchestre. Mais leur présence n’est que très fugace dans le film. Ici, de toute manière, tout le monde est traité sur un pied d’égalité.

Surtout, au-delà des individualités, le vrai personnage de ce documentaire est le collectif et, plus encore, l’échange, la confrontation, le travail, bref la fabrication sociale de l’opéra. Et elle est d’autant plus agréable à observer pour le spectateur que la mise en scène de Jean-Stéphane Bron est à la fois extrêmement dynamique et sensible. Le montage "classique" du film lui donne ce rythme. Parallèlement à celui-ci, un montage son, constitué de musiques rajoutées, offre comme une seconde narration, qui permet de prendre une jolie distance, souligner une tension, mettre du suspens ou renforcer un sentiment joyeux.

Culture Box


Enfin, l’Opéra de Paris est aussi une institution publique, un symbole culturel, un lieu de pouvoir, une des incarnations fortes de la France, de son rayonnement et de sa culture. À côté des artistes et des ouvriers, le film touche là au troisième niveau de l’institution, son administration et son pouvoir exécutif. Car il faut repérer les futurs talents, élaborer une programmation (œuvres modernes ou anciennes  ? metteurs en scène classiques ou iconoclastes  ? etc.), gérer les crises et le rapport à la tutelle politique…

Bron a été servi. Pendant son long séjour en 2015 et 2016, il a croisé les manifs contre la loi El Khomri sous les fenêtres du bâtiment Bastille, le moment des attentats (l’atroce épisode du Bataclan a touché de près toute salle de spectacle) et la démission de l’éphémère directeur de la danse Benjamin Millepied, qui a mis les pieds dans le plat en voulant moderniser les us et pratiques du ballet.  […] Il y a ici autant de suspense (mais infiniment plus naturel) que dans une saison de téléréalité, autant d’humour que dans une comédie (voir le casting du taureau pour Moïse et Aaron), autant d’épaisseur humaine et d’enjeux que dans n’importe quelle bonne fiction. L’Opéra, c’est du grand cinéma parce que tout en imprimant son regard subjectif et ses choix de montage subtils, Bron a préservé la part pleinement vivante de l’organisme humain qui palpitait devant lui.

Les Inrockuptibles.


Comment se passe une négociation avec les syndicats après un préavis de grève qui menace la tenue d’une production ? Comment discute-t-on avec le chœur à propos de son positionnement sur scène, en carré ou en diagonale ? Comment dire au téléphone à Benjamin Millepied qu’un successeur potentiel lui a déjà été trouvé ? Le regard toujours très sobre de la caméra porté sur la confrontation sociale est l’un des intérêts de ce film. La fabrication artistique aussi révèle des perles : le remplacement d’un baryton dans la production des Maîtres chanteurs deux jours avant la première, demande aux équipes de l’Opéra de Paris une réactivité qui transparaît ici dans toute sa fluidité : magique ! Le casting d’un taureau prévu sur la production de Moïse et Aaron est lui, montré avec poésie et humour…

Culture Box


Plus familier de la guitare électrique que du bel canto, le réalisateur vaudois avait la chance de ne rien connaître à l’art lyrique, ni au ballet. « Tout était à découvrir et c’est toujours un bon point de départ : l’envie d’en savoir plus. » Quant à Stéphane Lissner, il n’était pas chaud pour accueillir une caméra dans ses murs ; il s’est ravisé quand il a compris, en visionnant les films de Bron, qu’il avait affaire à un artiste.

Le Temps.ch

Synopsis

Propos du réalisateur