Hadewijch_Extraits critiques

Propos du réalisateur

« Mon film est un appel à la grâce. C’est une expérience mystique donnée à un spectateur de cinéma. Mais pas un acte de foi. Le regard mystique n’est pas un regard intellectuel. C’est un rayonnement assez étrange qu’il est difficile de décrire. Je ne pense pas que le cinéma soit une Église nouvelle. C’est un vrai lieu d’expérience du sacré. Il y a un cinéma commercial prosélyte et un cinéma qui invite plutôt l’individu à une méditation personnelle. La seule vraie question est la dignité du cinéaste. Il y a des cinéastes pourris qui font des images de salauds, dépourvues de spiritualité et utilisées à des fins mercantiles. Elles sont immédiates et malsaines. »

« Il y a un rapport évident entre l’image cinématographique et la vision mystique. Il y a une circulation possible entre les deux. Ce que je cherche au cinéma, c’est un sacré mystique, en dehors des voies catholiques. Mon héroïne a une grâce, une sainteté laïque. Je pense que nous sommes tous appelés à la sainteté. Ce terme revêt une forme d’élévation poétique qui existe chez tout être. C’est une augmentation de la grâce, un accroissement. Quelqu’un qui est amoureux est appelé vers la sainteté. »

« Je ne suis pas du tout croyant. Pour moi, parler de Dieu est une transgression, c’est quelque chose d’intéressant et qui ne m’est pas naturel. Donc j’ai écrit très près d’Hadewijch, mais avec un souci du contemporain. Son ouvrage à elle est dans l’esprit de l’amour courtois. C’est très beau, très enflammé et d’un érotisme très étonnant pour une demoiselle chaste. Il y avait une chaleur qui m’intéressait beaucoup.  Donc je suis parti vers le récit d’une jeune femme d’aujourd’hui, et j’ai écrit le scénario. »

« Le fonctionnement du film, les ellipses à la fin, c’est un abandon des explications. Je ne peux pas raisonner là-dessus, toutes les explications sont vaines. Ca me tombe des mains. Mais je ne le savais pas au départ. Au départ, j’avais des tas de scènes bien explicatives. C’est au montage qu’on voit que ça ne tient pas la route rationnellement, mais spirituellement. La mystique oblige une cinématographie adéquate qui n’est plus dans une logique psychologique. »

« Aujourd’hui on invite des sociologues pour expliquer le monde, on a un rapport quantitatif avec les choses. C’est très français. Je suis à l’avance sur recettes, je vois bien qu’on juge sur la morale, si un film a du sens par rapport à la société. C’est grave parce que ça empêche de voir, de sentir, ça empêche l’aventure, de trouver des formes, des représentations. Il faut que ce soit correct et juste. Et puis ça doit accompagner avec un petit côté Dossiers de l’ écran. »

Entretien : octobre 2009  (Les Cahiers du cinéma : N° 650 ; 11/2009)

« On a besoin du mystère. Plus c’est caché et mystérieux, plus c’est présent dans notre esprit. Si vous n’avez pas la privation, vous n’avez pas la jouissance. C’est pour ça que l’amour est un art. Aimer quelqu’un, c’est être capable de s’en priver. On ne peut pas faire un film sur le spirituel, parce qu’il n’est pas visible. On l’espère mais on ne peut que filmer des paysages, des corps, des cieux, des maisons, des arbres. Le spirituel émerge à force de filmer. »

« Hadewijch est un film sur l’amour et le temps de l’amour. Il essaie d’en traiter la puissance absolument belle et maléfique. Cette durée-là, c’est du temps sacré. Je pense que le véritable amour est totalement mystique parce que dans la mystique, vous arrivez à une véritable union. Je voulais faire un film d’amour mais pour moi, l’amour humain a tellement d’écueils, d’avatars et un ordinaire tellement difficile, que l’amour de Dieu était une façon poétique de l’exprimer. Hadewijch, c’est le pur sentiment amoureux. »

(Entretien : blog MK2)

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