Les enfants d'Arna

HOMMAGE A JULIANO MER-KHAMIS « juif palestinien »


« Il croyait dans le pouvoir des mots davantage que dans celui des armes. Il plaidait pour une Intifada culturelle, un soulèvement du cœur et de l’esprit. Il voulait rompre de cette manière les chaînes de l’occupation. L’acteur arabo-israélien Julinano Mer-Khamis, 52 ans, né d’une mère juive et d’un père palestinien, est mort assassiné le 4 avril. Il est tombé sous les balles d’un assaillant inconnu, dans le camp de réfugiés de Jénine, au nord de la Cisjordanie. C’est là qu’il avait fondé le Théâtre de la Liberté, à la fois salle de spectacles et école d’art dramatique… EN 1988, alors que la première Intifada fait rage, sa mère ouvre dans le camp de Jénine une école alternative pour les enfants. Mer-Khamis assure les cours de théâtre, dans un local de fortune… L’aventure s’arrête peu après la mort, en 1995, d’Anna Mer, qui succombe  à un cancer. Sept ans plus tard, au plus fort de la seconde Intifada, Juliano Mer-Khamis apprend que l’un de ses étudiants d’alors s’est transformé en bombe humaine dans un centre commercial d’Hadera, dans le nord d’Israël. Le camp de Jénine se relève alors d’une très violente offensive au cours de laquelle une cinquantaine d’habitants ont été tués, ainsi qu’une vingtaine de soldats. Des centaines de maisons ont été détruites au bulldozer. Juliano Repart à Jénine, caméra à l’épaule, sur la trace des gamins qui suivaient ses cours. Il découvre que l’un d’eux a été tué dans l’attaque israélienne, qu’un autre est en prison, qu’un troisième est devenu chef local des Brigades des martyrs d’Al-Aqsa, l’aile militaire du Fatah, le parti de Yasser Arafat, alors président de l’Autorité palestinienne. Il sera tué durant le tournage au cours d’une incursion israélienne… Ces images pleines de violences mêlées aux bouts de films tournés plus tôt, l’aller-retour entre le visage rieur des gamins d’alors et celui, désespéré, des jeunes adultes qu’ils sont devenus, débouchent sur un documentaire en forme d’uppercut, Les Enfants d’Arna, le portrait d’une génération sacrifiée. »


Benjamin Barthe (Le Monde 07/04/2011)

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