L'argen de la vieille_Propos du réalisateur

EXTRAITS CRITIQUES


« Luigi Comencini a souvent travaillé dans le registre de l’humour, il a démontré un grand talent dans le mélodrame, le film historique ou l’adaptation littéraire. Loin de la misanthropie et du cynisme d’un Risi, Comencini était avant tout un cinéaste humaniste, engagé et néanmoins sceptique, doté d’une véritable conscience politique. Cela se ressent dans ses films les plus personnels et réussis comme L’Argent de la vieille (Lo scopone scientifico, 1972) qui mêle à la perfection humour noir et lutte des classes. Un couple de chiffonniers se fait régulièrement plumer au scopone, jeu de carte italien, par une vieille milliardaire américaine en villégiature mais garde l'espoir, à chaque nouvelle rencontre, de gagner le pactole. Comencini signe un modèle de la comédie italienne. Sans abuser des excès satiriques inhérents au genre il réussit une œuvre admirable, film grand public qui ne sacrifie jamais la pertinence et la clarté de son message politique sans non plus sombrer dans le didactisme.»

Olivier Père (Arte.tv : janvier 2013)


«beau film sentimental raconte l'histoire terrifiante d'une vieille milliardaire américaine qui prête chaque année de l'argent à un pauvre chiffonnier napolitain pour le battre et le plumer à tous les coups. C'est bien sûr dans le suspense répétitif (et s'il gagnait cette fois?) que tient tout le film, les habitants du bidonville servant de chœur antique, de rime impossible au rêve du prolétaire ébloui. Sujet casse-gueule (on sait que la lutte des classes ne donne jamais de bons films), distribution de rêve: Alberto Sordi au sommet de sa forme, à la fois ridicule et pathétique, plus petit et plus grand que la vie; Bette Davis, vieillie à faire peur, caricaturant comme un vieux chiffon les rôles de salope qui l'ont rendue célèbre; et Joseph Cotten dans le rôle de valet, de chauffeur, de maître d'hôtel (d'amant?). Illuminant le film de sa grâce de princesse déplacée, Silvana Mangano (la femme de Sordi), seule lueur d'espoir «réaliste» au milieu de cette sublime novela, seul personnage qu'on imagine un instant gagner. Une petite fille mettra fin in extremis à ce jeu cruel avec la cruauté d'un ange. Les enfants, chez Comencini, sont toujours les seuls gagnants.»  Louis Skorecki (Libération 08/01/2012)

«é par Rodolfo Sonego d’un fait divers dont il avait été  lui-même le témoin, cette fable anticapitaliste extrêmement virulente et adroite est une allégorie de la lutte des classes et de la puissance de l’argent. Elle a stimulé comme jamais le talent de Comencini… Rarement dans un film  divertissement et message social  auront été liés d’une manière aussi indissociable et aussi brillante.» Jacques Lourcelles (Dictionnaire du cinéma)


«é entre Pinocchio  et Un Vrai crime d’amour, ce film, l'un des plus grands de Comencini, ne nous fut révélé qu'en 1977. c'est une fable tragique et réaliste sur les rapports des pauvres et des riches avec l'argent. Semé de détails humoristiques et grotesques  dans la meilleure tradition de la comédie italienne, ce film est empreint d'une lucidité amère, d'une profonde sensibilité devant la misère et le «sort» des humains.»

Jacques Siclier (Télérama : 3/10/1983)


«y a du Georges Bataille dans cette parabole diabolique. L’Argent de la vieille est un chef d’œuvre où l’humour féroce, la noire amertume n’excluent pas la lucidité troublante et glacée. C’est une fable éblouissante, poétique, politique et métaphysique. Au spectateur maintenant de trouver d’autres lectures et de se prendre au jeu de ce sujet en or».  Jean Collet (J'informe : 02/12/1977)


«morale de la fable est claire : contre le capitalisme représenté par la vieille, il n’y a pour les prolétaires qu’une solution : la mise  à mort. Il est impossible de gagner en jouant le jeu.» La Quotidien  du peuple (14/12/1977)


«sous couvert d’une comédie grinçante, mais dont l’intensité se trouve en outre envahie par le suspense de l’enjeu de la partie, c’est à une implacable analyse des rapports de classes que se livre Comencini à travers le symbole du jeu (...). Lo Scopone scientifico constitue une extraordinaire leçon d’économie politique. Mais le plus extraordinaire c’est encore que cette leçon soit donnée par le biais d’une éblouissante comédie aussi féroce que brillante. Un chef d’œuvre dans la lignée du Lubitsch de To be or not to be: c'est tout dire!» Guy Braucourt (Les Nouvelles littéraires : 10/12/77)