Premieres neiges_Extraits critiques

Aïda Begic obtient son diplôme de la Sarajevo Academy of Performing Arts dans la section réalisation en 2000. D'emblée, son film de fin d’études, First Death Experience se fait remarquer. Il est présenté en sélection officielle àCinéfondation au festival de Cannes 2001 et remporte de nombreux prix.

En 2003, elle réalise son second court-métrage North Wend Mad. La jeune femme devient enseignante en réalisation àSarajevo Academy of Performing Arts et réalise en parallèle de nombreuses publicités et spot vidéos. Begic se lance aussi dans la production en 2004, en fondant Mamafilm, une société de production indépendante aux côtés de Elma Tataragic, avec qui elle co-scénarise tous ses films. En 2008, les deux femmes écrivent àensemble Premières Neiges, produit par leur société. Aïda Begic signe ainsi son premier long-métrage.

En 2012, la réalisatrice tourne Djeca (enfants de Sarajevo), un drame familial, sélectionné dans la catégorie Un Certain Regard de la 65e édition du festival de Cannes, qui repart avec la mention spéciale du jury.

Depuis l’éclatement de la Yougoslavie, l’industrie cinématographique de Bosnie-Herzégovine peine  à se reconstruire. Seules quatre villes possèdent encore un cinéma, Sarajevo, Mostar, Banja Luka, Zenica. Ces dix dernières années, seuls 7 films bosniaques sont parvenus sur nos écrans dont Premières neiges et Djeca de Aida Begic. Trois foyers de la vie culturelle luttent quotidiennement à Sarajevo pour maintenir  la présence d’un cinéma exigeant :


-Le Sarajevo Film Festival, créé en 1995, qui accueille 3000 cinéphiles tous les ans et qui présente près de 200 films, a contribué à faire connaître les œuvres de cinéastes bosniaques, dont Premières neiges.


-Le Centre André Malraux, créé il y a près de 20 ans par Francis Bueb, afin de fonder «lieu de résistance avec des films, des livres, de la pensée, apporter l’art dans une ville assiégée, comme rempart  à la barbarie.» Jean Luc Godard  qui a soutenu le Centre depuis sa création, a présenté Eloge de l’amour, puis Liberté et Patrie, coréalisé avec Anne Marie Mieville. C’est là qu’est né le projet de Notre musique et qu’a eu lieu la première de For ever Mozart en 1996, projection précédée d’un message du cinéaste : «Avant de montrer mon film à Strasbourg, capitale de l’Europe, je voulais le montrer à Sarajevo, capitale de la douleur.»

 

-La Film Factory, une école de cinéma à Sarajevo fondée par Béla Tarr. Elle s’adresse  à de jeunes réalisateurs expérimentés et leur permet d’obtenir un doctorat reconnu par l’Union européenne, en réalisant en trois ans quatre courts métrages et un long.


Source : Cahiers du cinéma N° 691 : Céline Gailleurd : Quel avenir pour le le cinéma à Sarajevo ?

Aïda BEGIC

NOTE D’INTENTION


La guerre est l’une des situations les plus terribles qu’il est donné à vivre, à cause de la proximité constante de la mort. Si la mort vous poursuit en temps de paix, alors la paix devient une situation de même essence que la guerre. Les temps de paix sont parfois plus compliqués que les temps de guerre. Le matérialisme reprend vite le dessus et vous commencez à oublier toutes les choses essentielles que vous avez pu apprendre pendant la guerre. Les gens se battent pour une place au soleil, découvrant que la Terre n’a pas arrêté de tourner entre-temps. Nous ne pouvons pas oublier le passé et le futur ne peut pas l’effacer. Vivre dans l’illusion n’aidera personne à acheter son billet pour l’Union Européenne, car le mensonge se répandra comme une tumeur et consumera tout être vivant. Ces relations entre la vie et la mort, la guerre et la paix, le passé et le futur créent beaucoup d’absurdités dans la vie des gens de mon pays. Elles suscitent beaucoup de questions sans réponse. La douleur et la joie, l’amour et la haine, l’Est et l’Ouest nous arrivent en même temps et s’entrechoquent. Tout cela rend mon pays et ses habitants très spéciaux, mais il n’est pas toujours facile de trouver son chemin dans la confusion et l’injustice de l’après-guerre. Comme il n’est pas facile d’avoir des rêves et de croire qu’ils peuvent se réaliser. Les habitants de Slavno trouvent la force de résister et d’avoir leurs propres rêves, même s’il s’agit parfois de cauchemars. La liberté, c’est de pouvoir choisir et il lutteront pour elle. Si vous imaginez un village complètement détruit recouvert de fleurs magnifiques, de fruits énormes et d’eau pure, alors vous comprendrez l’essence de cette poésie qui montre que la construction est bien plus puissante que la destruction. Peut-être qu’aujourd’hui, en 2008, cela semble excessivement romantique d’entendre qu’il vaut la peine de se battre pour la vérité et la liberté. Mais sans doute avons-nous seulement besoin qu’on nous le rappelle.

Si l’art ne s’en charge pas, qui donc le fera ?


Aïda BEGIC

SYNOPSIS


Six femmes, un grand-père, quatre petites filles et un garçon vivent à Slavno, village isolé et dévasté par la guerre. Leurs familles et amis ont été tués et leurs corps n'ont jamais été retrouvés. Les premières neiges vont les couper du monde et risquent de mettre la vie des villageois en danger. Tandis que la menace se rapproche, les villageois, menés par Alma, tentent d'échapper à la misère en vendant des confitures, des fruits et des légumes, qui ont fait la réputation du village.

 Deux hommes d'affaires débarquent à Slavno en leur demandant d'abandonner leurs maisons moyennant une certaine somme d'argent. Les villageois se trouvent face à un dilemme : doivent-ils accepter une offre qui pourrait leur sauver la vie, mais leur faire perdre leur âme ? Une tempête soudaine piège les visiteurs dans le village, les contraignant à affronter un problème plus grave - la vérité.