Une année polaire_Extraits critiques
Une année polaire

SYNOPSIS


Pour son premier poste d’instituteur, Anders choisit l’aventure et les grands espaces : il part enseigner au Groenland, à Tiniteqilaaq, un hameau inuit de 80 habitants. Dans ce village isolé du reste du monde, la vie est rude, plus rude que ce qu’Anders imaginait. Pour s’intégrer, loin des repères de son Danemark natal, il va devoir apprendre à connaître cette communauté et ses coutumes.


Un récit d’acclimatation en milieu inuit.

En seulement quatre longs-métrages, le réalisateur Samuel Collardey, chef opérateur de formation, a creusé un sillon personnel au sein du cinéma français, celui d’un amalgame sensible et souvent convaincant entre fiction et documentaire. Une année polaire, s’extrayant du contexte français, retrace le périple d’Anders, un jeune instituteur danois sans expérience, parti prendre son premier poste à Tiniteqilaaq, minuscule village inuit perdu au fin fond du Groenland. Sur place, il est confronté à une classe d’enfants agités et, plus généralement, à la méfiance des habitants, formant une communauté isolée. Pas à pas, Anders s’initie au mode de vie local et découvre un monde rattrapé par la modernité (le réchauffement climatique grignotant la banquise, l’exil des jeunes partant faire leurs études ailleurs). L’instituteur se lie plus particulièrement avec l’un de ses élèves en difficulté, Asser, 11 ans, qui rêve de devenir chasseur comme son grand-père.

 

Perspective coloniale

Le film inscrit d’emblée la démarche d’Anders, désireux d’échapper à un destin tout tracé (son père attendait de lui qu’il reprenne la ferme familiale), dans une perspective coloniale. En effet, le récit s’ouvre sur son entretien d’embauche, pendant lequel la recruteuse lui présente le poste comme une mission civilisatrice, consistant à inculquer le danois à des populations reculées. Au village, l’instituteur se retrouve bien malgré lui dans une position de domination, qu’il lui faudra inverser pour véritablement s’intégrer : ce n’est qu’en apprenant lui-même la langue de ses hôtes, le groenlandais, qu’il parviendra à se faire accepter. L’instituteur se fait dans le même temps élève, pour créer les conditions d’un échange bilatéral.

Pour le reste, le film s’en remet au déroulement balisé du récit d’acclimatation, avec ses cycles initiatiques voués à rapprocher le métropolitain des indigènes et le professeur de ses élèves – non sans évoquer quelques problèmes, comme l’alcoolisme endémique des Inuits, qui explique pourquoi les enfants sont souvent élevés par leurs grands-parents. Mais pourquoi convoquer une réalité territoriale si complexe, si c’est pour la plier aux exigences d’un scénario aussi bouclé et résolutif ? Le substrat documentaire apparaît trop « encadré » par l’écriture fictionnelle, qui cède parfois à la tentation du pittoresque (les paysages glaciaires balayés du haut d’un drone, l’édulcoration de certaines situations).

 

Le film redevient passionnant dès qu’il s’adonne à sa veine anthropologique

Le film redevient passionnant dès qu’il s’adonne à sa veine anthropologique, plongeant dans le quotidien des Inuits, s’arrêtant sur leurs visages et leurs gestes, détaillant leurs pratiques, comme la pêche au phoque, les courses en traîneau, la fabrication d’un harnais, la procession d’un enterrement. Le temps libre, dispensé d’enjeux dramatiques, occasionne aussi quelques scènes fascinantes, car essentiellement descriptives, comme cette belle partie de cartes qu’Anders joue avec des villageois. Alors, Une année polaire semble donner lointainement suite à Nanouk l’Esquimau (1922), le chef-d’œuvre de Robert Flaherty, comme pour mesurer le quasi-siècle qui sépare les Inuits d’hier de ceux d’aujourd’hui.

 

D’après Mathieu Macheret, Le Monde

  

SAMUEL COLLARDEY

Samuel Collardey, né le 29 juillet 1975 à Besançon, est un directeur de la photographie et réalisateur français.

 

Samuel Collardey travaille durant quatre ans pour la télévision avant d’intégrer La Fémis dans le département Image. Durant sa formation il est chef opérateur sur de nombreux courts métrages. Son film de fin d’études Du soleil en hiver reçoit de nombreux prix, dont le prix SACD à la Quinzaine des réalisateurs du Festival de Cannes, le prix spécial du jury à Clermont-Ferrand.

 En 2008 sort son premier long métrage L’Apprenti. un docu-fiction qui fait le portrait d’un jeune apprenti dans une ferme du Haut-Doubs. Le film est récompensé par le prix de la semaine de la critique à Venise et le prix Louis-Delluc du meilleur premier film. En parallèle, il continue de pratiquer le métier de chef opérateur, et collabore avec le réalisateur Nassim Amaouche sur Adieu Gary et avec Frédéric Louf sur J’aime regarder les filles.

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Bien loin de céder à la convention du « pris sur le vif », ses films s’enracinent dans une réalité précise dont l’observation au long cours nourrit le travail d’écriture, donnant ensuite lieu à des tournages in situ, avec des acteurs non professionnels amenés à rejouer devant la caméra tout ou partie de leur propre expérience.

Mathieu Macheret, Le Monde

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Filmographie


Comme directeur de la photographie

 

Courts métrages

2004 : Tempête de Nikolay Khomeriki

2005 : Naissance de l’orgueil d’Antonio Hébrard

2005 : À deux (Vdvoyom) de Nikolay Khomeriki

2005 : Du soleil en hiver de lui-même

2005 : Contre Temps de Armel Hostiou

Longs métrages

2009 : Adieu Gary de Nassim Amaouche

2011 : J’aime regarder les filles de Frédéric Louf

2018 : Une année polaire (+ réalisateur)

 

Comme réalisateur

 

Courts métrages

2004 : René et Yvonne

2005 : Du soleil en hiver

Longs métrages

2008 : L’Apprenti

2013 : Comme un lion

2015 : Tempête

2018 : Une année polaire

  

Extraits critiques

Une année polaire