JINPA
Jinpa_Propos du réalisateur

EXTRAITS CRITIQUES

Comme celui de Tharlo, le berger tibétain, le scénario est une adaptation, mais il est adapté cette fois de deux nouvelles : l’une de Pema Tseden lui-même, J’ai écrasé un mouton, dont il a réussi à lier le fil narratif à celui d’une nouvelle d’un autre auteur tibétain : L’Assassin de Tsering Norbu. Jinpa, un conte tibétain est le reflet de la créativité du réalisateur. Son style prend ici des couleurs oniriques, nouvelles chez lui.

J’ai écrasé un mouton fournit le thème principal de l’histoire, le titre de la nouvelle étant aussi le titre chinois du film. Dans un style subtilement satirique typique de Pema Tseden, le récit décrit avec un luxe de détails non dénués d’humour un incident mineur en soi mais qui, dans la vie d’un Tibétain, finit par prendre des conséquences dramatiques en raison des croyances bouddhistes qui y sont attachées: sur une route déserte, dans un paysage sans la moindre trace de vie à perte de vue, un chauffeur de camion percute un mouton venu soudain se jeter sous ses roues et le tue. Il n’a plus dès lors qu’un souci: aider la conscience du mouton à franchir les difficiles étapes de sa transmigration en faisant réciter les prières idoines avant de livrer son cadavre aux vautours.

L’Assassin apporte un second thème celui de la vengeance, s’ajoutant au premier, celui de la rédemption. Pema Tseden avait en fait d’abord pensé adapter cette nouvelle, avant de la compléter par la sienne. Le scénario initial portait ce titre, qui est également le titre tibétain du film. Tsering Norbu conte l’histoire d’un Khampa qui a passé dix ans de sa vie à rechercher le meurtrier de son père pour le tuer à son tour et venger son père. Quand il le retrouve, cependant, l’homme a vieilli, il a femme et enfant, et il est devenu un fervent bouddhiste. Lui aussi avait agi pour venger sa famille. Le Khampa décide alors de mettre fin à ce cycle inexorable de vengeances dicté par la tradition.

Brigitte Duzan, traductrice de L’assassin, Dossier de presse


«’est un film sur l’éveil. Une fois éveillés, nous pouvons choisir notre route vers l’avenir», explique le réalisateur. Ce conte moderne dans une région isolée du Tibet raconte avec humour une histoire de vengeance et de rédemption. Un long-métrage parfaitement maîtrisé.

Frédérique Schneider, La Croix

Extraits d’un article de Françoise Robin sur le cinéma tibétain

En République Populaire de Chine (RPC), la représentation des Tibétains à l’écran a été longtemps monopolisée par l’État chinois et par les réalisateurs Han (en Inde et au Népal où vivent actuellement 120 000 Tibétains, contre six millions au Tibet dit « chinois », un cinéma tibétain a commencé à émerger un peu plus tôt). (…) Au fil des ans, les réalisateurs tibétains ont écrit et tourné des histoires situées dans les milieux les plus divers géographiquement (en témoigne la richesse des dialectes qui y sont entendus), avec des équipes de plus en plus tibétaines et des acteurs qui, d’amateurs, deviennent de plus en plus professionnels. Évitant l’exotisme ou la facilité, ils nous content des histoires de Tibétains, principalement des paysans et des pasteurs-nomades, mais aussi des chauffeurs de camion, des professeurs, des coiffeuses, et même des réalisateurs. Le bouddhisme figure souvent en arrière-plan, tant il sous-tend le monde culturel tibétain, mais il ne monopolise pas l’écran.

La musique tibétaine, allant de l’opéra au rap, y a toute sa place. Grâce à eux, on peut constater que la société tibétaine est une société humaine comme les autres : elle abonde en histoires d’amour, en interrogations sur l’avenir, en tensions familiales, elle prise l’humour, elle est rongée par des problèmes économiques, les rivalités personnelles ou communautaires, le remords. Parfois, mais discrètement, l’histoire, douloureuse mais indicible, est également évoquée. Une autre grande absente est la ville de Lhassa, puisque Pema Tseden et Sonthar Gyal, originaires de l’Amdo (actuelle province du Qinghai), à 1500 kilomètres de Lhassa, n’ont jamais obtenu le droit d’y filmer. On ne soulignera jamais assez les prodiges que cette première génération a dû accomplir pour mener à bien son rêve : bâtir un cinéma national avec des codes, des histoires, un tempo, qui lui sont propres, un cinéma qui ne semble pas s’essouffler mais, au contraire, est en passe de prendre une place centrale en Chine et dans le monde. Elle a inspiré à son tour de jeunes tibétains qui se lancent dans l’aventure.

Françoise Robin, Dossier de presse

SYNOPSIS

PROPOS DU REALISATEUR