04-03-Le genou d'ahed_Exitaits critiques
04-01-Le genou d'Ahed

NADAV LAPID

Nadav Lapid, réalisateur, scénariste, monteur, acteur et critique littéraire israélien.

 

Né en 1975 à Tel-Aviv-Jaffa, il étudie la philosophie à l’université de Tel-Aviv, la littérature française à l’Université de Paris VIII et le cinéma à l’école de cinéma et de télévision Sam-Spiegel à Jérusalem.

Après avoir réalisé trois courts métrages, publié un roman et travaillé comme critique littéraire puis journaliste sportif, il entre en 2008 à la Cinéfondation du festival de Cannes où il écrit le scénario de son premier long métrage, Le Policier.

Son second long métrage L’Institutrice est révélé à la 53e Semaine de la critique, durant le Festival de Cannes 2014.

Durant la première quinzaine d’août, il fait partie du jury international du Festival international du film de Locarno 2015.

Durant la quinzaine de mai, il fait partie du jury de la Semaine de la critique, où il présente en séance spéciale son moyen métrage From the Diary of a Wedding Photographer, lors du Festival de Cannes 2016.

Lors du Festival international du film de La Roche-sur-Yon 2018, il fait partie du jury de la compétition internationale.

Il obtient l’Ours d’or à la Berlinale 2019 pour le film Synonymes.

Il obtient le Prix du jury du Festival de Cannes 2021 pour son film Le Genou d’Ahed, ex-æquo avec Memoria de Apichatpong Weerasethakul.


En 2019 il est fait Chevalier des Arts et des Lettres en France.

FILMOGRAPHIE

 

2021 : Le Genou d’Ahed (long métrage) Festival de Cannes, Sélection officielle, Compétition, Prix du Jury

2021 : The Star (court métrage) Festival de Cannes, Sélection officielle

2019 : Synonymes (long métrage) Festival de Berlin, Ours d’or

2016 : Journal d’un photographe de mariage (moyen métrage) Festival de Cannes, Semaine de la Critique

2015 : Why ? (Court métrage)

2014 ; L’institutrice (long métrage) Festival de Cannes, Semaine de la Critique

2014 : Ammunition Hill (court métrage)

2011 : Le Policier (long métrage) Festival de Locarno, Prix du jury ; Prix du public au Festival des trois continents de Nantes.

2007 : La petite amie d’Émile (moyen métrage)

2005 : Kvish (court métrage)

2004 : Proyect Gvul (court métrage)

À l’origine du film


Le genou d’Ahed a été écrit dans un sentiment d'urgence, un sentiment qui m'a intimé d'écrire, de tout écrire, vite, jusqu'au bout. Le film est né d'un évènement qui s'est passé en juin 2018. Mon téléphone a sonné et une femme qui s'est présentée comme la directrice adjointe des bibliothèques au ministère de la Culture m'a invité à présenter mon film L’institutrice à la bibliothèque de Sapir, un village minuscule et reculé de la région de la Arava, tout au bout d'Israël.

Juste avant que la conversation ne se termine, elle a mentionné un document que je devais obligatoirement remplir et signer pour que ma présentation du film soit validée… Cela m’a paru louche. Surtout en ces jours où la liberté d’expression est en Israël un soleil maussade de décembre, qui s’assombrit et s’éteint. Et la figure prédominante de cette campagne contre la liberté d’expression était la ministre de la Culture en personne…

J’ai dit à la directrice adjointe des bibliothèques: «’imagine que la liste des sujets est conforme aux sujets autorisés par le régime, et que ces gens n’aiment pas les opinions autres que les leurs. Et que celui qui n’est pas d’accord avec eux, ils le font taire».

Après un court silence, à ma surprise, elle a répondu: «ne suis pas fière de ce que je fais là. Depuis deux ans, ils veulent tout contrôler. Ils ne supportent plus les opinions différentes des leurs».

Après avoir raccroché, j’ai appelé une amie qui écrit pour le seul journal encore libre et sérieux en Israël. Cet aveu très direct d’une fonctionnaire importante l’a étonnée elle aussi, et elle m’a demandé si je pouvais l’enregistrer à son insu. Cela m’a paru impossible d’un point de vue moral. Je me suis imaginé la catastrophe qui tomberait immanquablement sur la tête de cette jeune femme avec qui j’avais parlé, une fois que cet enregistrement serait rendu public. Dans le meilleur des cas, elle serait destituée du ministère de la Culture et aucun poste au service de l’État ne lui serait plus accessible.

Quelques mois plus tard, la ministre de la Culture a initié la loi pour la loyauté de la culture, qui interdit le financement d’une œuvre d’art jugée infidèle à l’État. Une loi qui peut être votée à tout instant. La démocratie relative qui existait encore ici se rétrécit de plus en plus.

Peut-être que c’est le destin inévitable d’un pays en guerre éternelle. Le destin d’un pays où presque chaque habitant, moi inclus, a connu la guerre, pris part à la guerre, à la violence... La liberté d’expression artistique est devenue, étrangement, le drapeau emblématique de cet écroulement.

Dans le scénario que j’ai écrit, le cinéaste prend ce chemin que moi-même je n’ai pas pris. Il est d’accord pour jeter la directrice adjointe des bibliothèques dans l’abîme, afin d’essayer de freiner les roues du char fasciste galopant.

Y., le cinéaste, est dur, sans pitié, arrogant, agressif, enragé. Une rage politique justifiée? Ou bien n’est-ce que de la cruauté? Ou peut-être juste une énorme tristesse face à une double mort, celle de sa mère, qu’il ne peut empêcher, et celle de son pays, peut-être encore sauvable. Mais lui-même, en son for intérieur le sait bien: il n’a pas le niveau de folie et de grandeur d’esprit suffisants pour le sauver.

Les mots sont un ingrédient permanent de cet univers... Leur moteur, c’est le désespoir, l’impuissance et la tristesse de Y., qui l’obligent à ne jamais s’arrêter, à avancer toujours plus rapidement et avec plus de bruit;[ils sont] l’acte de celui qui parle pour ne pas tomber, pour ne pas pleurer.


NADAV LAPID

SYNOPSIS

Y., cinéaste israélien, arrive dans un village reculé au bout du désert pour la projection de l’un de ses films. Il y rencontre Yahalom, une fonctionnaire du ministère de la culture, et se jette désespérément dans deux combats perdus : l’un contre la mort de la liberté dans son pays, l’autre contre la mort de sa mère.

Extraits critiques

Le genou d'Ahed