Voyage à cythère_Extraits critiques

EXTRAITS CRITIQUES

SYNOPSIS

Alexandre (Giulio Brogi), metteur en scène est à la recherche d'un vieil acteur. Il le trouve chez un vendeur de légumes. Le film peut commencer. Alexandre accueille son père Spyros (Manos Katrakis), ancien résistant, de retour d'URSS après trente-deux années d'exil forcé. L'amnistie a en effet été prononcée après la chute de la dictature des colonels en 1974. Ce dernier retrouve sa femme, Katerina (Dora Volanaki). Puis il retrouve son village, sa maison et quelques anciens camarades. Mais Spyros a beaucoup de mal à comprendre le temps écoulé. L'idée même du retour qu'il a chérie durant 32 ans est devenue intangible. Seule son épouse semble le comprendre.

Un cinéaste de la modernité

 

« Grâce à la collaboration fidèle des mêmes collaborateurs, le scénariste italien Tonino Guerra, les directeurs de la photographie Georges Arvanitis et Andréas Sinanos, le décorateur Mikes Karapipéris et la musicienne Eléni Karaïndrou, en particulier, tous les films d'Angelopoulos portent la marque d'un auteur, tant sur le plan esthétique le refus de l'approche « psychologisante » et individualiste communément admise, que thématique  son œuvre affichant une dimension fondamentalement politique. Des dictatures, occupations, guerre civile et exils à répétition subis par le peuple grec depuis le début du siècle, jusqu'aux conflits récents qui ont embrasé les Balkans, c'est toute l'histoire européenne du xxe siècle qui constitue la matière de ses fictions.

Le cinéma d'Angelopoulos relève donc de la modernité, au sens où s'y affirme une conscience de l'historicité comme horizon indépassable, en même temps que l'expérience esthétique y devient le modèle de l'expérience partagée d'un « monde commun ». À l'instar des grandes œuvres poétiques ou romanesques de ce siècle qui mêlent prose et poésie, réflexion historique et remémoration, ses films élaborent une véritable poétique de la mémoire. Parce que le récit, confronté aux catastrophes du siècle, a perdu sa capacité d'ordonner le réel historique, dans les films d'Angelopoulos, c'est au spectateur qu'incombe de voir surgir, sous le présent, les spectres du passé. Cette mutation du regard du spectateur fait ainsi de lui l'acteur de la recomposition de l'histoire. »

Sylvie ROLLET (Encyclopedia Universalis)

Sylvie Rollet est l’auteure de Voyage à Cythère : la poétique de la mémoire d’Angelopoulos (L’Harmattan 2003) et de Angelopoulos au fil du temps (Presse Sorbonne nouvelle 2007)

THEO ANGELOPOULOS

«J’aime les plans-séquences, pas les bavardages.»

« Après des études littéraires et de droit, Theo Angelopoulos s'inscrit à l'IDHEC à Paris en 1962. De retour en Grèce, il est critique cinématographique jusqu'en 1967. Après un film resté inachevé, il tourne son premier court-métrage en 1968.

Theo Angelopoulos se signale dès son premier long métrage, La reconstitution (1970), avec un style et une démarche idéologique originaux dans le contexte du cinéma grec. Il filme ensuite une vaste trilogie sur l'histoire de la Grèce contemporaine : Jours de 36 (1972), Le voyage des comédiens (1975) et Les chasseurs (1977) retiennent l'attention de la critique internationale. L'auteur y dessine une œuvre didactique et engagée, qui propose un examen de l'histoire grecque et démonte les mécanismes de la dictature des Colonels. Films d'une grande rigueur formelle et d'une complexité qui déroute souvent le public, ils captivent le regard par leur usage de longs plans séquences jouant sur l'espace et le temps. L'analyse psychologique individuelle en est quasiment absente au profit de l'étude de groupes sociaux. Alexandre le Grand (1981) est davantage une réflexion sur l'idéologie, s'appuyant sur le portrait d'un brigand grec dont le destin de héros populaire puis de tyran n'est pas sans rappeler celui de Staline. Le cinéaste poursuit son œuvre de démythification avec Voyage à Cythère (1984), histoire cruelle et amère d'un vieux combattant communiste de la guerre civile exilé en URSS et qui s'en retourne dans sa mère patrie. Dans ce film, l'inspiration d'Angelopoulos se déplace et s'attache désormais à la quête intérieure de personnages désenchantés. Ainsi L'apiculteur (1986) et Le pas suspendu de la cigogne (1990), films pessimistes sur les incertitudes de cette fin de siècle, dont Marcello Mastroianni est la figure principale. Theo Angelopoulos trouve la consécration avec Le regard d'Ulysse (1995) qui donne en plusieurs tableaux somptueux une allégorie de l'histoire des Balkans, jusqu'à la ville martyre de Sarajevo. Il obtient la consécration en 1998 au Festival de Cannes avec L'éternité et un jour, qui remporte la Palme d'Or. »

BIFI (Bibliothèque du film).

 En 2003, sort Eleni : la terre qui pleure, « premier film d’une trilogie qui a pour ambition de raconter le siècle dernier, par le biais de trois histoires qui couvrent trois moments d’un grand amour. » La deuxième partie de cette trilogie, La Poussière du temps, sortie en 2008, n’a toujours pas trouvé de distributeur en France !