Vengo_Extraits critiques

« C’est un film qui dit : ‘Je suis Gitan. Malgré tout, les persécutions, le mépris, je suis Gitan. J’existe, nous existons... »


Tony Gatlif est un cinéaste gitan, et depuis plus de vingt ans son cinéma parle des Gitans. Vibrant, barbare et chaleureux, excessif, passionné…

Les Echos


BM: Tony Gatlif, cinéaste gitan ou cinéaste des Gitans ?

TG: Je dirais cinéaste gitan des Gitans, parce qu’on ne peut pas faire de films sur eux sans les connaître. […] Si on veut aller au fond de ce qu’on veut raconter, il faut appartenir à quelque chose. C’est […] comme raconter l’histoire d’une famille. […] Mon père était Kabyle et ma mère Gitane, mais quand un non-Gitan épouse une Gitane, c’est lui qui vient à la maison et non le contraire.


BM: Comment est née votre vocation ?

TG: Quand on commence à être cinéaste, à faire de la musique et à évoluer dans le monde du spectacle, on a deux choix. Soit gagner de l'argent, soit défendre des gens, nos gens. Je crois qu’on peut considérer le cinéma comme un art ou comme l’équivalent du travail d’un avocat. C’est ce dernier choix que j’ai fait. Les Gitans du monde entier subissent une injustice incroyable depuis des siècles. C’est impossible de ne pas vouloir en parler dans mes films.


BM: Qu’est-ce qui dans votre parcours vous a fait embrasser cette cause ?

TG: Quand on a 5 ans et qu'on voit son père se faire embarquer à 5 heures du matin dans un camion de gendarmes et se faire frapper, excuse-moi mais je fais un film tout de suite après. C'est de cette injustice dont je parle. Il n'avait rien fait [.].. C'est à partir de là que j'ai commencé à ouvrir les yeux sur le monde.

weblettres.net/blogs (Benjamin MiNiMuM)


Cependant, manifestement étranger à l’idée d’un rattachement exclusif à une communauté, Gatlif se définit lui-même comme un «éditerranéen». Vengo, c'est le but que je cherchais instinctivement depuis longtemps. «'ai gommé toute représentation de moi-même, tout interdit. Je suis parvenu à m'exprimer en toute liberté, par pure nécessité. Je me suis libéré de toute contrainte, je suis allé au bout de mes idées. J'ai compris que ce qui comptait le plus pour moi, ce sont les autres. Un film avec des gens vrais, des non-acteurs magnifiques. C'est un film tourné vers les autres et en parlant des autres, je parle de ma propre famille.»

Allociné

EXTRAITS CRITIQUES

La musique est « le ciment qui rattache les humains » En s’attachant à deux familles andalouses, [Vengo fait] flamboyer le flamenco.


La musique est la grande passion de Tony Gatlif […]. Il n’y a pas un film de lui où les personnages principaux n’écoutent, émerveillés, parfois possédés, une chanson. […] Quelquefois même, le cinéma de Gatlif donne l’impression de n’exister qu’afin de garder quelques images précieuses de ces musiques. Un temps le récit est mis entre parenthèses, et nous regardons et écoutons, côte à côte auprès des comédiens et de la caméra, les musiciens jouer leur morceau. Moments sacrés, hors-fiction, où tous nous communions dans l’émotion.

Le Monde Diplomatique


Il considère la musique comme «liberté qui [lui] donne le souffle de faire [ses] films, le souffle d’aller à la rencontre des autres dans le monde». […] Celle-ci est un des éléments essentiels, créateur même de situation dans ses films. Il compose lui-même des morceaux dans […]Vengo.

Africulture


«Ça fait vingt ans que je cherchais un film sur le flamenco, celui qui reste difficile à saisir, qui ne s’offre pas facilement. [Jusqu’à Vengo j'avais] pris le flamenco en spectateur aficionado, alors qu'il fallait le vivre de l'intérieur. La vraie question, c'était : comment peut-on mettre en image quelque chose qui se sent, qui se vit mais qui ne se voit pas? Avec Vengo, j'ai gommé tout ce qui était folklorique, ethno, ou admirateur. J'étais comme eux, avec eux, à l'intérieur.»

Allociné


La musique [des gitans] est la langue d’un peuple qui écrit avec sa chair plus qu’avec l’alphabet. Elle est danse, joie, désespoir, aspiration à l’universel et aussi un moyen de survivre. «musique est quelque chose de vital. Sans elle, je crois que je serais incapable d’exister, et ce depuis que je suis tout gosse. Sans constituer le moins du monde une religion, elle représente le seul vrai lien entre les morts et les vivants, elle porte la joie, la douleur, la mélancolie et l’amour sur les sommets de l’émotion»

Cette musique qui affirme la vie au paroxysme n’a rien à voir avec la vision folklorique, fasciste, qu’en ont les dictateurs comme Franco* qui entendent s’abriter derrière une tradition soi disant représentative de leur pays. La musique vivante n’a pas de borne, elle est la fête qui va jusqu’à la transe, jusqu’à l’extase qui efface la douleur et qui guérit.


 *La censure franquiste a contribué à donner du flamenco une vision folkloriste (qui, hélas, lui survit à l’étranger comme en Espagne).

Cafaitdesordre.com (François Berheim)

Propos du réalisateur