Disparaissez les ouvrier_Propos
disparaissez les ouvriers_synopsis


EXTRAITS CRITIQUES

    

« Malgré le point d'exclamation dans le titre Disparaissez les ouvriers !, Christine Thépénier et Jean-François Priester filment moins le coup de balai libéral que la disparition effective des forces ouvrières. Abasourdis, trois employés de Legré-Mante, à Marseille, lisent l'ordre de liquidation judiciaire de leur entreprise, pourtant leader sur le marché mondial d'acides tartriques. "Je n'arrive pas à comprendre", dira l'un. "On est partis pour se battre jusqu'au bout", dira un autre. Derrière la caméra, les réalisateurs, eux, captent l'état de choc, la fin d'une vie et l'impression, pour les ouvriers, d'avoir été des pions sur un échiquier. Avec, pour preuves, les images d'une usine aux airs de Tchernobyl après la catastrophe, ce documentaire est une parfaite peinture de la lutte syndicale aujourd'hui: sans espoir. Peut-être parce qu'elle est perdue d'avance. »

Julien Welter (L’Express : 08/05/2012) 

 

« ...Ce qui en ressort est à la fois triste et beau. De la dignité et de la colère, de la rage et de l'impuissance, et puis ce mélange très surprenant entre le site dévoré par la rouille et l'azur enchanteur qui l'entoure. Les paroles, fortes, restent longtemps dans la tête du spectateur, qui disent l'indignité ancienne et consentie des conditions de travail, puis l'infini mépris du sort soudain réservé à ces ouvriers qui ont sacrifié leur vie à la tâche. "L'injustice, ça provoque la haine" dit une vieille femme à la fin du film : nous en sommes là, très exactement.

L'histoire séculaire du mouvement ouvrier, qui existe bel en bien encore, est-elle autre chose que cela ? L'aliénation des corps, l'humiliation des hommes, la violence physique et symbolique exercée à leur encontre. »

Jacques Mandelbaum (Le Monde : 08/05/2012)

 

« La grande qualité du film est d’avoir su établir une relation de confiance palpable entre les filmeurs et les filmés. De jour comme de nuit, la caméra prend son temps pour accompagner ces hommes qui refont devant elle les gestes mille fois exécutés pour expliquer leurs tâches pénibles, auxquelles ils sont pourtant attachés. Après cinq mois d’occupation, la liquidation judiciaire est prononcée par la cour d’appel. Le drapeau de la CGT flotte au-dessus de l’usine rouillée tandis que les camions chargent les véhicules porteurs de palettes sous l’œil résigné des ouvriers silencieux. La caméra capte une scène spontanée et émouvante ; trois des leurs, juchés sur un muret entouré de pins, devisent sur la ruine de l’industrie locale, les raisons supposées de l’hypothèque du terrain et le goût des patrons pour le luxe. « Marseille, capitale culturelle européenne ! » conclut le beau visage amer d’une femme de salarié.»  M.T. ( Les Fiches du cinéma  : 9 mai 2012)

 

« Disparaissez les ouvriers ! pourrait être simplement un documentaire militant qui dresserait une logique contre une autre.  La puissance dramatique du film va au-delà de ces dialectiques. A la spéculation abstraite, aux calculs d’intérêts politiques et financiers qui se font au mépris de la réalité vivante, et qui restent hors champ, le film oppose un paysage concret, des présences charnelles. Des visages d’hommes, des paroles d’hommes. On est saisi par leur colère calme, leur courage, leur amertume lucide et ironique. Ils sont beaux, d’une beauté  qui contraste avec leur environnement abimé et abimant. Ils parlent bien. C’est du Guédiguian, version documentaire. Partisan ? Mieux : ils imposent la personne humaine à ceux qui l’abandonnent dans leurs comptes. »

Marie-Noëlle Tranchant (Le Figaro : 9 mai 202)

 

« 48 valeureux », selon l’expression graphée sur un mur décrépi, occupent une usine de traitement d’acides tartriques, abandonnée par ses dirigeants. Nous sommes à Marseille, dans un cabanon de syndicalistes dont la vue sur la mer rend encore plus cruelle la liquidation judiciaire d’un bien commun, celui d’ouvriers qui avaient maintenu à flot un petit empire industrieux guetté par la ruine.  Loin des fables sociales de Guédiguian, Disparaissez les ouvriers ! Est un manifeste désespéré, le récit d’une occupation vouée à l’échec… Dans un avenir proche, cette survivance industrielle devrait être rasée pour laisser la place à des résidences destinées à la classe aisée. Des bobos à la place des prolos ? Que devient alors la cité ?  L’amplitude de la question veut donc  que l’on s’arrête sur ce film  qui dépasse amplement la survie  d’une poignée de résistants. »

V.T. (Positif N°616 : juin 2012)